l'histoire de financement de l'économie mondiale, entre prospérité économique et crises financières.


Les opérations de financement international sont anciennes. Sans remonter au Moyen Âge et au rôle des banquiers génois, vénitiens, lyonnais et flamands, on constate dès le milieu du xix siècle l’essor des flux financiers internationaux.

 Les capitaux des pays développés (la France, la Grande-Bretagne) contribuent au financement des pays neufs (les États-Unis, le Paraguay, la Russie par exemple) et accompagnent la « première mondialisation ». À partir des années 1960, les banques suivent les implantations industrielles de leurs clients et cherchent à mobiliser les ressources nécessaires aux investissements directs internationaux. C’est dans ce contexte que naissent et se développent les euromarchés.

La crise pétrolière de 1974 va marquer une nouvelle étape : l’économie mondiale devient une « économie à découvert » (H. Bourguinat). On assiste en effet à la fois à une montée de l’endettement des États (qui ne parviennent pas à équilibrer leurs finances publiques du fait de la hausse des dépenses et de l’accroissement plus modeste des recettes), à une montée de l’endettement des agents privés (entreprises et ménages), à une montée de la dette du tiers-monde.

À partir du début des années 1980, la globalisation financière s’amplifie, la règle des 3 D permet le développement de nombreuses innovations financières : émergence ou développement de nouveaux produits financiers (swaps, options…), essor de nouveaux marchés financiers, nouvelles technologies de la communication qui facilitent la circulation internationale des capitaux. Toutes ces évolutions sont présentées comme le moyen de faire face aux ajustements rendus nécessaires par les chocs réels subis par l’économie mondiale : politiques macroéconomiques divergentes, émergence des nouveaux pays industrialisés (NPI), soldes extérieurs structurellement excédentaires pour certains pays et structurellement déficitaires pour d’autres, déséquilibres démographiques, effondrement du système soviétique et réunification allemande, etc. Mais le poids croissant de la finance dans l’économie mondiale élève le risque systémique et déstabilise tous les types de régime de change. Ainsi, depuis les années 1980, les crises financières surviennent à un rythme plus soutenu et s’articulent plus fréquemment à des crises de dette souveraine. Ces crises sont aussi fortement récessionnistes dans les pays les plus récemment ouverts aux mouvements de capitaux et ont un coût budgétaire élevé pour les pays concernés.

 

Les crises financières des années 1980 et 1990

Le changement d’orientation de la politique monétaire américaine en 1979 provoque une hausse spectaculaire des taux d’intérêt réels et une forte appréciation du dollar. Cette situation révèle les tensions financières qui traversent l’économie mondiale. En 1982, la crise de solvabilité du Mexique menace de s’étendre à d’autres pays en développement et les banques créancières sont menacées de faillite. Pour éviter ce scénario, la Banque des règlements internationaux (BRI) accorde un crédit relais au Mexique et le FMI pousse les pays du tiers-monde à adopter des politiques d’ajustement structurel afin de rembourser leurs dettes et incite à développer des marchés financiers. L’administration du Trésor des États-Unis intervient aussi pour résoudre cette première crise de la dette (plan Baker en 1985 et plan Brady en 1989).

 En octobre 1987, un krach financier de grande ampleur se déclenche à la Bourse des valeurs de New York, nécessitant l’intervention de la Réserve fédérale américaine et des autres banques centrales pour éviter les faillites bancaires en chaîne.

À partir du début des années 1990, des placements importants sont à nouveau effectués au sein des pays émergents (Asie de l’Est et Mexique pour l’essentiel). Il ne s’agit plus de prêts bancaires comme à la fin des années 1970, mais d’investissements directs et d’investissements de portefeuille attirés par des rendements élevés et rassurés par les politiques libérales mises en œuvre sous l’égide du FMI. Ces afflux de capitaux génèrent des bulles spéculatives et des crises financières et économiques lorsqu’ils sont brutalement rapatriés (sudden stop), comme au Mexique en 19941995, en Asie en 1997 (Thaïlande, Malaisie, Corée, etc.) et en Russie en 1998. D’autres économies émergentes sont touchées : le Brésil

 En 1999, la Turquie et l’Argentine en 2001. En Europe, les attaques spéculatives contre les monnaies vulnérables au sein du SME se développent en 1992 et 1993.

La crise financière du début des années 2000

La fin des années 1990 et le début des années 2000 voient les capitaux refluer vers les pays riches du fait notamment des crises asiatique et russe. Dans le même temps, l’essor des nouvelles technologies contribue au gonflement d’une bulle spéculative notamment sur le marché NASDAQ (où sont cotées les entreprises de haute technologie) aux États-Unis. Entre 2000 et 2002, les principaux indices boursiers baissent fortement. Ces différents krachs ne s’expliquent pas principalement par l’attentat du 11 septembre 2001, mais plutôt par l’« exubérance irrationnelle » des marchés dénoncée dès 1996 par A. Greenspan (alors président de la Réserve fédérale des États-Unis).

Dans ce contexte spéculatif, la faillite du courtier en énergie Enron a joué un rôle décisif en révélant les pratiques de dissimulation de la situation réelle des entreprises aux actionnaires et aux opérateurs des marchés (banques, experts, etc.). C’est ainsi qu’Enron avait créé plus de 3 000 sociétés écrans pour dissimuler son endettement. C’est donc le manque de fiabilité de l’information financière et la mauvaise qualité de la gouvernance d’entreprise qui nuit à l’efficience des marchés. Diverses mesures sont adoptées dans les années qui suivent pour modifier les règles comptables internationales et pour renforcer les contrôles des comptes des entreprises.

La crise financière de 2007-2012

La « grande récession » débute le 2 avril 2007 avec la faillite de la plus importante institution de prêts subprimes aux États-Unis, bientôt suivie par la faillite de deux fonds de placement appartenant à la banque Bear Stearns (la valeur des actifs correspondant aux prêts subprimes s’effondre). C’est le début de la crise des subprimes, une crise d’une ampleur sans précédent depuis 1929.

Pendant les années 1990 et le début des années 2000, l’économie mondiale a connu une forte croissance économique alimentée dans certains pays (États-Unis, Espagne et Grèce notamment) par un crédit facile et une abondance de liquidités. Ce climat favorable à la croissance reposait notamment sur le paradoxe de la tranquillité : les banques centrales étant parvenues, à partir du début des années 1980, à juguler l’inflation, l’expansion du crédit s’est opérée sans accélération de la croissance du niveau général des prix. La hausse du prix des actifs n’a pas été retenue comme un indicateur de tension inflationniste par les banques centrales et a alimenté l’expansion du crédit (notamment du crédit hypothécaire encouragé par la hausse du prix de l’immobilier).

 L’éclatement de la bulle spéculative a conduit à une crise bancaire. En effet, le développement de la titrisation a eu pour effet de disséminer les crédits à risques dans les bilans bancaires. Quand la valeur de ces actifs risqués (bientôt dénommés actifs toxiques) s’est effondrée, de nombreuses banques se sont trouvées en difficulté. Certes, l’intervention très vigoureuse des banques centrales qui ont alimenté les marchés en liquidités et mis en œuvre une politique monétaire non conventionnelle a évité la réédition des événements de 1929 (effondrement du système bancaire). Mais la crise bancaire s’est transformée en crise économique mondiale : forte baisse du commerce mondial en 2009, faible croissance ou croissance négative dans de nombreux pays, hausse du chômage.

Cette contagion à l’économie réelle résulte d’une forte contraction de la demande liée à un mouvement général de désendettement (la seconde phase du cycle financier). Par ailleurs, les plans de soutien à l’économie ont été insuffisants (surtout en Europe).

 

Enregistrer un commentaire

0 Commentaires